On a tous déjà lancé un jeu en se disant que le développeur avait probablement une affiche de l’original collée au-dessus de son bureau. Cette sensation de déjà-joué, vous l’avez peut-être ressentie avec un duo comme Hades et Sworn, où l’on sent clairement une parenté dans l’approche et l’intention. Mais cette proximité pose une question toute simple : un jeu qui ressemble beaucoup à un autre peut-il être aussi bon que son modèle ? L’histoire du médium apporte une réponse assez claire… et souvent surprenante.
Quand Sworn brille autant qu’Hadès à mes yeux
La comparaison entre Hades et Sworn s’impose d’elle-même tant les deux titres semblent partager une intuition commune du roguelite moderne : celui qui mise avant tout sur la relance, l’énergie et cette capacité à transformer chaque défaite en impulsion. Hades a façonné un modèle où la narration, l’esthétique et le gameplay fusionnent dans une cohérence rare. Chaque run y raconte quelque chose, chaque amélioration renforce le lien avec un univers qui respire la vie, le mythe et l’élan tragique. Sworn arrive derrière un géant, mais ne trébuche jamais sous son poids : il reprend cette base familière tout en déplaçant subtilement le centre de gravité. Là où Hades enveloppe, Sworn aiguise. Là où Hades guide, Sworn bouscule. Cette nuance change tout : on ne joue pas à Sworn comme à une variation, mais comme à une réponse.
Et c’est précisément cette réponse qui fait la force de Sworn. Le jeu ne cherche pas à s’imposer comme un “Hades-like”, mais comme une déclinaison assumée d’un langage partagé. Sa manière de simplifier la structure, de rendre les combats plus directs et de favoriser l’instinct plutôt que l’accumulation narrative lui permet de trouver son propre souffle. Là où Hades charme par la densité de son univers et la fluidité de sa mise en scène, Sworn séduit par ce sentiment immédiat de contrôle, par cette façon d’aller droit au cœur de la sensation sans jamais trahir le plaisir du genre. C’est dans ce déplacement minuscule — mais décisif — que se loge la préférence personnelle : non pas par opposition, mais parce que Sworn met en avant ce que certains joueurs recherchent avant tout, cette pureté de l’action qui, une fois apprivoisée, donne envie d’enchaîner les runs comme on respire.
Quand répéter finit par créer un genre
À force de voir des jeux reprendre une mécanique, un rythme ou une structure, on finit parfois par baptiser un genre entier à partir d’un seul titre. C’est ainsi que des noms comme Castelvania, Metroid ou Rogue sont devenus plus que des jeux : des modèles reproductibles, affinés, mutés, détournés jusqu’à former de véritables familles.
Ce phénomène a donné naissance à des genres où plusieurs titres sont devenus des références à part entière : les nombreux héritiers du rogue-like, les jeux inspirés par l’exploration et la structure labyrinthique de Metroid ou Castelvania, ou encore les expériences centrées sur la mort et le recommencement qui doivent tant à Rogue. Avec le temps, ces jeux ne sont plus perçus comme des copies, mais comme des variations légitimes d’une même vision, prouvant qu’un concept peut devenir plus fort que son créateur.
C’est exactement ce qui s’est passé avec les jeux dérivés de Darksouls, qui ont engendré une vague entière de titres adoptant sa philosophie du challenge, de la progression par l’échec et de la narration discrète. Là encore, un jeu qui suit les traces de son aîné n’est pas condamné à rester dans l’ombre : il peut devenir une référence de son propre côté.
La personnalité, l’ingrédient qui change tout
Pour qu’un jeu très proche d’un autre soit aussi bon, il doit surtout trouver sa voix, même discrète. Une variation dans la dynamique des combats, une manière de structurer l’aventure, une façon particulière d’offrir des choix au joueur… C’est souvent dans ces petits détails que se cache la différence entre une copie fade et un héritier légitime.
Vous l’avez sûrement déjà vécu avec ces titres inspirés des souls, justement : certains reprennent les mécaniques avec soin, mais ne dégagent rien de particulier. D’autres, au contraire, parviennent à développer leur propre atmosphère, leur propre rythme, et finissent par laisser un souvenir aussi fort que l’original. Tout se joue dans cette capacité à apporter quelque chose, même minime, qui donne envie d’y revenir.
Copier pour comprendre, transformer pour exister
Un jeu peut donc être très proche d’un autre tout en atteignant la même qualité, tant qu’il ne se contente pas d’en recopier la surface. La ressemblance n’est pas un problème en soi : dans l’histoire du jeu vidéo, elle a même été un moteur d’évolution constant, un terrain fertile où naissent les genres, les codes et parfois des œuvres majeures.
En réalité, ce qui distingue une simple imitation d’un bon jeu, c’est cette manière de comprendre le modèle au point d’en retenir l’essentiel sans s’y enfermer. Un équilibre délicat, mais qui, lorsqu’il est atteint, peut donner naissance à des titres aussi marquants et enthousiasmants que leurs inspirations.
Bref, un jeu proche d’un autre peut être aussi bon que l’original, et parfois même participer à bâtir ce qui deviendra, plus tard, un genre entier. Une belle preuve que la créativité ne se mesure pas toujours à la distance qu’on prend, mais aussi à la façon dont on transforme ce qui nous a donné envie de jouer en premier lieu.

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