L’art délicat de conclure une trilogie… De surcroît un reboot, initié brillamment en 2013 puis prolongé magistralement en 2015 avec Rise of the Tomb Raider. Doit-on se montrer conservateur au risque de lasser ? Ou doit-on renverser la table, au risque de froisser sa fanbase ? Eternel dilemme. Entre temps, exit Crystal Dynamics, l’éditeur Square Enix a confié cette troisième aventure de Lara Croft à son studio de Montréal. Cette autre considération ne facilite évidement pas la tâche. Après avoir terminé le jeu et avec une cinquantaine d’heure au compteur, voici mon verdict dans le test de Shadow of the Tomb Raider (STR).
Condition du test : version 1.6, sur Xbox One X.
Test de Shadow of the Tomb Raider : la fuite en avant
Lara Croft est incorrigible. Telle une pie, il lui FAUT ramasser toutes les reliques à coté desquelles elle passe. Et au cours d’une escapade au Mexique, l’impensable se produit. En concurrence avec les Trinitaires, Lara s’empresse de ramasser la relique de trop. Ce simple geste entraîne un cataclysme sans précédent dans la région : tremblements de terre, glissements de terrain, inondations sans commune mesure. Mais le péril menace désormais le monde entier.
Lara Croft est une tête brulée et fonce au Pérou pour essayer d’enrayer la machine via la recherche d’un autre artefact. Malgré la dévastation, l’héroïne s’engage donc à cœur perdu dans une course contre la montre, à la fois contre les éléments pouvant précipiter la fin du monde et les Trinitaires…
Catastrophiste à souhait, le scénario vaut surtout pour son point de départ original. Rendez-vous compte, par un acte irréfléchi, la parfaite héroïne Lara Croft est responsable de la mort d’innocents et de la destruction d’une ville au Mexique. Mine de rien, il fallait oser. Sorti de ce prologue éprouvant, l’essentiel de l’aventure prend place au Pérou. Le long de l’Amazone, dans une jungle inhospitalière ou parmi des ruines oppressantes, Lara se démènera sans faiblir pendant une trentaine d’heures pour boucler une aventure principale plaisante à défaut d’être originale. Et rajoutez une dizaine d’autres pour compléter les quelques missions annexes et autres tombeaux. Ceux-ci, au nombre de neuf, sont des énigmes facultatives à l’histoire et nécessiteront de se creuser un peu les méninges.
Test de Shadow of the Tomb Raider : Lara, l’apex predator.
Toujours en TPS, cette aventure reste sur un mélange savoureux d’action, d’infiltration et d’exploration. Coté discrétion, Lara peut (enfin) se faire oublier après avoir été repérée par un ennemi. De nouveau furtive, elle pourra par exemple déferler sur sa victime depuis un mur de boue ! Tel Schwarzy dans Predator, Lara peut se couvrir de boue pour se cacher dans son environnement et prendre un aspect véritablement badass. Pour être clair, Lara Croft est LA prédatrice ultime dans la jungle péruvienne. Et on prend un malin plaisir à piéger les ennemis et les exécuter brutalement, tel John Rambo dans sa première aventure. Ainsi, l’infiltration a fait l’objet d’un soin particulier et se révèle vraiment plaisante. De leur coté, les gunfight sont plus classiques et par voie de conséquence moins emballants.
La carte du jeu reprend les codes des deux premiers volets. Lara se balade donc dans quatre grandes zones reliées par des « couloirs ». Largement plus petites et linéaires, ces derniers n’existent que pour faire avancer le scénario. Par contre, coté exploration, le joueur est servi. La jungle luxuriante, un village de pécheurs entouré de ruines, une civilisation antique… le terrain de jeu revêt des ambiances plus variées que ce à quoi l’on pourrait s’attendre. Et il y a de quoi faire : des défis, des collectibles, des plantes, des matériaux, des missions secondaires données par des pnj. Autant d’occasion d’engranger de précieuses ressources et points d’expérience…
Test de Shadow of the Tomb Raider : en mode Lara Craft, ou lama Croft ?
Oui, même après les deux premiers volets, Lara a encore besoin d’Xp pour débloquer des compétences… Et c’est parfois un peu lourd. Je prends juste l’exemple des compétences permettant à Lara de bander plus rapidement son arc ou de tenir plus longtemps en apnée… Sans rire, cela fait deux fois que l’on acquiert ce genre de compétence au travers des aventures précédentes. Les développeurs n’ont pas d’autres idées ? Heureusement, outre les très classiques techniques d’éliminations furtives, de tir à l’arc etc, de nouvelles font leur apparition…. mais guère plus originales au final. Celles-ci sont liées à l’utilisation de plantes glanées dans la nature. Il sera possible alors d’empoisonner ou de rendre fous les ennemis au point de les pousser à s’entretuer. Mais aussi d’améliorer la perception de Lara pour détecter les ressources alentour ou sa concentration, c’est-à-dire de ralentir le temps en cours de visée.
Par contre, Shadow of the Tomb Raider se démarque avec son système de craft. Les potions de soin, de perception, de protection, de concentration, les munitions spéciales… tout cela se fait à la volée, en cours de jeu, sans passer par un menu. Simple, fluide et efficace. Comme dans les deux précédents jeux, Lara peut faire une pause à l’un des nombreux feux de camp. Ceux-ci font toujours office de check point, point de téléportation, d’achat de compétences et d’amélioration d’armes. D’ailleurs, si le l’arsenal est sans surprise, le nombre de pistolets, d’arc, de fusils à pompe et d’assaut a été revu à la hausse. Et petite nouveauté, Lara peut fabriquer et/ou rénover des tenues trouvées dans des cryptes. Porter une tenue octroie alors des bonus de furtivité ou de récolte de ressources.
Test de Shadow of the Tomb Raider : l’effet Wahou ?
La beauté crépusculaire et macabre du jeu frappe dès le prologue se déroulant au Mexique, pendant la fête des morts. Les effets de lumière sont à se décrocher la mâchoire et la possibilité de jouer en 60 images par seconde offre un confort sans pareil. Et l’émerveillement se poursuit jusqu’au Pérou où la jungle n’a jamais été aussi belle et étouffante… Au point que les panoramas « Wahou » sont plus rares que dans un Uncharted ou même les précédentes aventures de Lara. Pas grave, car on a vraiment l’impression de faire parfois un bond dans le temps et de (re)découvrir des civilisations avec des rapports à la vie et à la mort radicalement différents des nôtres, où ces deux concepts cohabitent parfois littéralement (les sacrifices, les rites funéraires). Le jeu ne met pas directement l’accent dessus, mais tout cela se fait en lisant les documents ou en observant les tombeaux et les ruines. Ainsi, comme à l’accoutumée, le background de ce Tomb Raider est riche et passionnant. La direction artistique de haute volée et le level design des cryptes, tombeaux, ruines forcent le respect.
Comme évoqué plus haut, Lara traversera quelques villages où des pnj (ridiculement peu variés d’ailleurs) lui donneront des missions secondaires. Hélas, elles ne sont guère passionnantes, ni amusantes. Trop scriptées ou trop simples, elles mettent surtout en scènes des dialogues où Lara est d’une naïveté et d’une gentillesse hallucinantes. A mon sens, cela produit une schizophrénie, un contraste maladroit avec les missions principales ou des gunfights où Lara se montre implacable, cruelle et sans pitié. Ce mouvement de balancier entre des traits de la personnalité de Lara n’est ni réaliste, ni crédible.
Test de Shadow of the Tomb Raider : à chacun son boulet…
N’est pas Uncharted qui veut. La pépite de Naughy Dogs brille notamment par ses dialogues truculents entre ses personnages attachants. Ici, Lara se trimballe une nouvelle fois Jonah alias FriendZone Man. La relation entre les deux sonnent toujours un peu faux tant Jonah finit toujours par aller dans le sens de Lara. Ah non, il se rebelle une fois pendant le prologue ! Mais finit quand même par suivre… Les rares phases à deux, où Lara est accompagnée par son Jonah, sont vite pénibles et on espère qu’une chose ! Que dans sa phrase suivante, Jonah dise « je vais rester là à étudier ces ruines ». Hé bien, prends ton temps, mec, pas de problème. Moi je vais plus loin m’amuser… Heu, sauver le monde je veux dire.
S’il est sans conteste magnifique, ce Tomb Raider souffre tout de même de problèmes techniques. Par exemple, quelques rares ralentissements viennent ternir l’exploration. La narration est parfois mise à mal par des soucis de synchronisations labiales pendant les dialogues, voire l’absence parfois de sons (qui nécessitent de relancer le jeu). Enfin, les temps de chargements entre les feux de camps sont longs.
Un dernier point qui m’a particulièrement agacé. La lampe torche, ce truc simple mais indispensable quand on traverse des ruines, cryptes, grottes… Le jeu choisit quand l’allumer, ce qui ne poserait pas de problème s’il le faisait bien. Hélas, j’ai pesté bon nombre de fois, plongé dans le noir n’y voyant rien. Pourquoi ne pas donner au joueur la possibilité toute bête d’allumer ou d’éteindre la lampe selon ses besoins ? Incompréhensible et rageant.
Test de Shadow of the Tomb Raider : Conclusion
Malgré son point de départ détonnant, l’histoire principale reste assez classique et nous dépeint surtout une Lara plus sombre que jamais… mais tellement immature pendant les missions annexes. S’il n’atteint pas le niveau de Rise, Shadow of the Tomb Raider est toutefois une honnête conclusion à la trilogie et un très bon jeu d’aventure sans surprise. Encore que pour les passionnés d’histoire, de mythologie et d’Indiana Jones, la plongée dans les civilisations d’Amérique Centrale et du Sud réserve son lot de dépaysement et de d’émerveillement. Malheureusement, ses quelques errements techniques ternissent quelque peu le tableau par moment. Mais le plaisir d’explorer des ruines d’une beauté macabre indéniable ou de se prendre pour un superprédateur balaient tout ça rapidement. Et on peut caresser des lamas. Sans se faire cracher dessus ? À vous de le découvrir… #teasingdefolie
Note : pour info, j’ai réalisé pour ma chaîne Youtube de nombreux guides pour ce Tomb Raider : succès/trophée, défis/tombeaux et astuces en tout genre.
La note est trop sévère ? Pas assez sévère ? Vous avez des informations supplémentaires à apporter ? N’hésitez pas à commenter ^^